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mardi 1 avril 2014

Bienvenue au paradis... fiscal

Ouvrir un compte bancaire dans un paradis fiscal est un jeu d’enfant vraiment à la portée de Monsieur et Madame Tout-le-Monde, a découvert notre Bureau d’enquête, qui détient maintenant une carte de crédit en bonne et due forme, émise dans une petite île des Caraïbes, pour dépenser ici à l’abri du fisc.
Il s’agit d’une carte MasterCard comme n’importe quelle autre.
Nous pouvons utiliser cette carte pour n’importe quel achat au Québec ou ailleurs, sans nous faire poser la moindre question.
Il nous suffit de nous rendre dans n’importe quelle institution financière d’ici pour y transférer des fonds. Pour notre part, nous l’avons approvisionnée à partir d’une caisse populaire du Mouvement Desjardins.
Pour rester sous les écrans radars du fisc, il suffit de déposer moins de 10 000 $ à la fois. Au-dessus de cette limite, les institutions ­financières canadiennes doivent le rapporter à un organisme fédéral, le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE).
Pour obtenir cette carte et ouvrir un compte offshore, il suffit d’un minimum de connaissances en finance, d’une compréhension moyenne de l’internet, mais surtout d’une bonne capacité à mentir sur son identité.
La vérité, personne ne semble vraiment vouloir la connaître, a-t-on découvert au fil de notre enquête, pourvu qu’il y ait de l’argent pour payer les frais d’ouverture du compte offshore.
Un jeu d’enfant
Au cours de notre enquête, qui nous a amenés à nous faire passer pour un entrepreneur d’une compagnie bidon de réparations d’ordinateurs, notre Bureau d’enquête a été capable:
  • de créer, sans jamais quitter Montréal, une compagnie coquille dans un paradis fiscal, le Belize, où il n’existe aucun registre public des compagnies et où notre identité réelle a été ­cachée par des prête-noms;
  • d’ouvrir un compte bancaire dans un ­autre paradis fiscal, St-Vincent-et-les-Grenadines, et d’obtenir une carte de crédit nous permettant de faire des retraits d’argent au Québec.
À aucun moment dans le processus, nous n’avons été embêtés par le fisc ou les banques qui ont accepté de faire transiter notre argent dans divers paradis fiscaux.
Fausses compagnies (coquilles vides), prête-noms, routes financières alternatives, notre enquête révèle que la machine du offshore est fort bien huilée.

UNE STRUCTURE OPAQUE ET DES PRÊTE-NOMS

Pour des yeux de l’extérieur, il est presque impossible de savoir qui est derrière la compagnie Technofix Corporation que nous avons créée.
Les administrateurs officiels de la compagnie sur papier sont des entités fictives, des prête-noms, qui n’ont aucun réel pouvoir.
Nous-mêmes ne les connaissons pas. Ce sont des noms qui nous ont été suggérés par notre facilitateur.
Le véritable propriétaire et de la compagnie est appelé le «Beneficial Owner», le propriétaire bénéficiaire. Seule la banque qui fait affaires avec nous et le fournisseur de services d’incorporation offshore sait que nous sommes cette personne. Revenu Québec et ­Revenu Canda l’ignorent.
Un autre document confidentiel qui nous a été envoyé mentionne que les administrateurs sur papier confèrent tous les pouvoirs de gestion au propriétaire bénéficiaire ­caché. On nous a même fait parvenir une lettre de démission non datée des ­administrateurs fictifs, en cas de problème.

C’EST TROP FACILE

1) Trouver un facilitateur
C’est par une simple ­recherche sur Google que nous avons pu nous mettre en relation, par courriel, avec une spécialisée dans l’incorporation et dans l’ouverture de comptes bancaires dans des paradis fiscaux. L’entreprise,A&P Intertrust, a des bureaux en Ontario et se dit membre de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI). Elle se vante sur son site de favoriser «une façon innovante de se lancer en affaires».
2) Créer une compagnie coquille
Une représentante de la compagnie A&P Intertrust nous a ensuite suggéré plusieurs noms pour mettre sur pied notre compagnie enregistrée au Belize. Nous avons opté pour le nom Technofix Corporation. La création d’une compagnie rend plus difficile l’identification du client qui désire placer des sommes offshore, même si la compagnie n’a aucune ­activité réelle. Nous avons écrit que nous étions spécialisés dans la réparation ­d’ordinateurs et que notre clientèle était principalement canadienne. Aucune vérification n’a été faite pour vérifier ces affirmations.
3) Ouvrir un compte dans une banque offshore
Une fois notre compagnie Technofix Corporation ­ouverte et enregistrée au Belize, nous avons obtenu une lettre d’introduction de la compagnie A&P ­Intertrust (Belize) Limited à la Loyal Bank, située à St-Vincent-et-les-Grenadines. On nous a aussi donné le choix d’autres ­paradis fiscaux: Îles Seychelles, Chypre, Singapour et Lettonie. Après l’envoi de documents personnels à la Loyal Bank visant à vérifier notre identité, nous avons été en mesure d’ouvrir le compte de Montréal au nom de la compagnie Technofix Corporation. Les informations personnelles envoyées à la banque n’apparaissent pas publiquement.
4) Envoyer l’argent
Nous avons reçu des instructions spéciales sur ­diverses routes à emprunter pour envoyer l’argent à la Loyal Bank. L’argent ne peut pas se rendre directement à St-Vincent-et-les-Grenadines du Canada, nous a-t-on expliqué. Il faut passer par des banques intermédiaires dans des pays étrangers. Les routes sont constamment changées, selon ce que nous a expliqué un employé. Un agent à la Loyal Bank nous a indiqué de faire un virement à la Mediterrean Bank, àMalte, d’où l’argent serait réacheminé vers St-Vincent-et-les-Grenadines.
5) Retirer l’argent
Une fois l’argent transféré, la banque nous fait parvenir dans deux colis différents, par courrier recommandé, une carte de crédit et un numéro d’identification personnel (NIP).

JEAN-FRANÇOIS CLOUTIER

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A l'envers c'est a l'endroit ,.........vous vous en appercevrez a un moment donné !