Wikileaks publie les courriels d'un think tank américain avec l'aide d'AntiSec
Plus de 5 millions de
courriels confidentiels de la firme de renseignements privés Stratfor
ont été volés par le groupe de hackers AntiSec. Wikileaks débute la
publication de ces messages aujourd'hui dans un dossier intitulé The
Global Intelligence Files.
Le groupuscule de pirates proche d'Anonymous a attaqué
Stratfor en décembre 2011 et a mis la main sur 200 Go de courriels et 75
000 numéros de cartes de crédit. Alors que les numéros ont été
simplement donnés sur le web, Wikileaks s'est chargé de dévoiler au
compte-goutte le contenu des courriels téléchargés par AntiSec
(Operation Anti-Security).
Dans cette opération, Wikileaks désire dévoiler « le fonctionnement
interne d'une entreprise qui annonce être un service de renseignement
privé, mais qui fournit des services de renseignement confidentiels à de
grandes entreprises. » Des informations confidentielles à propos des attaques du gouvernement
des États-Unis contre Julian Assange et WikiLeaks, ainsi que les efforts
de Stratfor pour renverser WikiLeaks. Plus de 4 000 emails font mention
de WikiLeaks ou de Julian Assange. Les emails révèlent également le
système de « porte tambour » en place dans les sociétés de renseignement
privées aux États-Unis. Les gouvernements et sources diplomatiques du
monde entier offrent à Stratfor un accès anticipé à la politique et aux
événements mondiaux en échange d’argent. Les « Global Intelligence Files
» révèlent la façon dont Stratfor a recruté un réseau mondial
d’informateurs, payés via des comptes bancaires en Suisse et des cartes
de crédit pré-payées. Stratfor dispose à la fois d’informateurs déclarés
et secrets, incluant notamment des employés gouvernementaux, du
personnel travaillant dans les ambassades ainsi que des journalistes du
monde entier.Selon George Friedman, PDG, à Reva Bhalla, analyste chez Stratfor, le 6
décembre 2011, à propos de la façon de tirer parti d’un informateur
Israélien fournissant des informations sur l’état de santé d’Hugo
Chavez, président du Venezuela: « Vous devez réussir à le contrôler. Ce contrôle pourra être d’ordre
financier, sexuel ou psychologique… Cela est destiné à lancer notre
discussion sur la prochaine étape vous concernant. » !
Dans un communiqué disponible sur leur site web,
on avance également que « les emails dévoilent le réseau d'informateurs
de Stratfor, sa structure de financement, les techniques de blanchiment
d'argent et les méthodes psychologiques employées (...) ».
Les courriels couvrent une large période, soit de juillet 2004 à
décembre 2011. Parmi les clients de Stratfor touchés, on retrouve Dow Chemical Corporation à Bhopal (Inde), Lokheed Martin, Northrop
Grumman, Raytheon, ainsi qu’à des agences gouvernementales, telles que
le Département de la Sécurité intérieure des États-Unis (DHS), les «
Marines » et l’Agence du renseignement pour la défense (DIA).
Stratfor est une société privée de renseignement basée au Texas. À
travers une analyse géopolitique du monde, elle offre à ses abonnés «
une compréhension des affaires internationales », peut-on lire sur le
site de la compagnie. Stratfor a condamné la « violation déplorable,
malheureuse et illégale de la confidentialité » dont elle a été victime,
via communiqué lundi.
L’utilisation des employés des entreprises ou États ciblés,
à des fins de renseignements, par Stratfor, s’est rapidement transformée en un
système de génération de profits d’une légalité douteuse. D’après les
emails, en 2009, Shea Morenz, alors Directeur Général de Goldman Sachs,
et George Friedman, PDG de Stratfor, ont eu l’idée d’« utiliser les
renseignements » que Stratfor récupérait de son réseau d’employés des
entreprises ou États ciblés, pour créer un fonds d’investissement
stratégique captif. Dans un document confidentiel d’août 2011, marqué «
DO NOT SHARE OR DISCUSS », George Friedman explique : « Le but de
StratCap est d’utiliser les renseignements et les analyses de Stratfor
pour faire du trading dans toute une gamme d’instruments géopolitiques,
incluant les obligations gouvernementales, les devises, etc… ». Les
emails montrent qu’en 2011, Morenz, de Goldman Sachs, a investi «
substantiellement » plus de 4 millions de dollars et a rejoint le
conseil d’administration de Stratfor. Au cours de l’année 2011, une
structure complexe d’actions offshore a été montée, s’étendant jusqu’en
Afrique du Sud, destinée à faire en sorte que StratCap semble légalement
indépendant. Mais, en privé, Friedman a annoncé au personnel de
Stratfor : « Ne voyez pas StratCap comme une organisation indépendante.
Cela vous sera utile de le penser comme une autre facette de Stratfor,
et Shea comme un autre directeur de Stratfor… Nous nous occupons déjà
des portefeuilles et des échanges fictifs. » StratCap devrait être lancé
en 2012.
WikiLeaks a également obtenu la liste des informateurs de Stratfor et —
dans beaucoup de cas — des archives de ses transactions bancaires,
incluant un paiement mensuel de 1200 $ à un informateur nommé
« Geronimo », géré chez Stratfor par l’ex-agent fédéral Fred Burdon.WikiLeaks a construit un partenariat d’investigation avec plus de 25
médias ou groupes d’activistes, afin d’informer le public à propos de
cet important corpus de documents. Ces organisations ont eu accès à une
base de données d’investigation sophistiquée, développée par Wikileaks,
et ont, avec Wikileaks, analysé ces emails. D’importantes informations
découvertes grâce à ce système seront révélées dans les médias dans les
prochaines semaines, au fil de la publication des documents sources.
REF.: Sources :
The Guardian,
AFP,
Wikileaks