Les personnages de la Fresque La Cène de Léonard De Vinci:
La Cène (en italien : L'Ultima Cena, soit « le Dernier Repas ») de Léonard de Vinci
L´un de vous me trahira. » Léonard choisit de représenter cet instant tragique de la vie de Jésus sur une paroi de la salle du réfectoire des dominicains de Santa Maria delle Grazie à Milan.
Il associe cet épisode à l'instauration de l'Eucharistie qui marque le début de la Passion: le Christ désigne le pain et le vin devant lui. Les fruits figurés au-dessus dans les lunettes complètent l'allusion. Les poires évoquent le bois de la croix, le rameau de palmier le martyre, et les pommes le salut.
Les expressions les plus variées:
Les apôtres, bouleversés par cette annonce, se regardent. Leur agitation est rendue par la diversité des mouvements, mais aussi à travers les expressions les plus variées animant leurs visages. En contraste, Jésus, seul à faire face au spectateur, est serein et, se dégage sur les trois ouvertures à l'arrière-plan.
Les disciples sont réunis en quatre groupes de trois, en référence à la Trinité. L'identification de chacun pourrait être, de gauche à droite : Barthélémy, Jacques le mineur, André, Pierre (qui parle juste derrière Judas), Judas (qui s'avance sur la table), Jean, et de I'autre côté Thomas, Jacques le majeur, Philippe, Matthieu, Thaddée et Simon. Certains historiens mettent en doute l'identité de Jean, à la droite de Jésus. En effet, l'aspect féminín de ce visage associé à la lecture d'un « M» que formeraient les drapés rouges de son manteau et bleus du Christ ont nourri l'hypothèse qu'il pourrait s'agir de Marie-Madeleine. Il est cependant difficile d’imaginer que les dominicains aient accepté que Jean ne soit pas présent sur cette Cène et qu'il soit remplacé par Marie-Madeleine.
Jean a souvent été représenté comme un beau jeune homme aux cheveux longs, ce qui ne peut qu'alimenter l'ambiguïté de lecture.D'autres énigmes renforcent le mystère : la main tenant un poignard juste derrière Judas semble n'appartenir à aucun des protagonistes.Peut-être peut-on la rattacher au bras de Pierre qui s'appuierait sur sa hanche. Le raccourci serait alors quelque peu maladroit. Et que dire de la main levée de Thomas, juste à côté de Jésus ?
Certains ont par ailleurs vu dans le visage de Thaddée un autoportrait du maître(Léonard de Vinci).
Une certitude : Léonard modernise la représentation de la Cène. Vasari, dans ses Vies nous apprend que Léonard laisse inachevé le visage de Jésus « qu'il renonçait à chercher sur terre, et dont son imagination était impuissante à concevoir la beauté et la grâce célestes, telles que devaient être celles de la divinité incarnée ». La composition est construite selon les principes de la perspective linéaire : les lignes de fuite convergent vers la tête du Christ, orientant tous les regards vers lui. Il est à la fois le point d'équilibre de la composition et l'auteur du trouble dans les esprits des autres protagonistes. Les têtes des apôtres sont alignées avec celle du Christ, sauf celle de Judas qui est légèrement placée en dessous, désignant ainsi le traître, dévoilé avant même d'avoir commis son méfait.
Cette peinture a été reçue comme un chef-d'œuvre divin, excitant le désir du roi de France qui envisageait de déplacer ce morceau de bravoure en son royaume, même s'il faisait partie intégrante d'un mur.
Les échos d'un génie:
Las ! Achevée en 1498, l'œuvre commence à s'abimer dès 1517, conséquence des recherches de Léonard. Au lieu de traiter cet ensemble a fresco, sur enduit frais, le maître a préféré associer la tempera (voir la note) et la peinture à l'huile. Il pouvait ainsi revenir à loisir sur l'œuvre sans être contraint par le caractère rapide et définitif de la fresque. Une restauration réalisée en 1953 recueille l'assentiment des spécialistes. Une nouvelle campagne suivra, dans le but de ne garder que ce qui a été peint par Léonard. En 1999, le résultat de 21 ans de travail provoque le scandale. Il a fais repeindre à l'aquarelle de nombreuses parties, dont le visage du Christ. Les avis des professionnels évaluent entre 20 et 90 % la part restante peinte de la main du maître(L. De Vinci).
Une incertitude à garder en tête lorsque l'on contemple cette Cène : le génie de Léonard n'y vit plus qu'en échos.
Nota:
Les Quatre techniques essentielles :
- Peinture à l'huile :
Ce procédé a été mis au point dans les Flandres à la fin du xvi siècle sous l'impulsion des frères Van Eyck (le triptyque Portinari de Van der Goes, influencé par les Van Eyck, est visible à Florence en 1483). Elle est constituée d'un mélange de pigments et d'un véhicule composé d'huile et de vernis, offrant une grande transparence.
• Tempera:
Mélange de pigments, d'eau, de colle à quoi on peut ajouter de l'œuf : le jaune permet l'émulsion et le blanc donne de l'éclat aux couleurs. Cette peinture est plus solide, mais plus opaque.
• Fresque:
Cette technique, connue dès l'Antiquité, consiste en l'application de pigments dilués dans l'eau sur une paroi enduite d'un mortier frais composé de chaux éteinte. Chaque jour de travail, on applique un enduit appelé intonaco capturant les couleurs. Cette technique a fresco demande une certaine rapidité d'exécution et le repentir n'est possible qu'avec une peinture à sec.
• Sfumato:
Diderot définit cette technique typiquement léonardesque comme « une manière de noyer les contours dans une vapeur légère ». En effet, ce terme italien signifie « enfumé ». Léonard a pu inventer cette manière à partir du moment où il a maîtrisé la peinture à l'huile et en appliquant des couches très fines appelés « glacis ». C'est cette accumulation de touches, contenant peu de pigment, qui crée le sfumato, où les contours ne sont plus identifiés, et où les transitions entre ombre et lumière se font dans la plus grande subtilité vincienne.
RÉF.: Religions et histoires, no. 11, nov-déc. 2006.Stéphanie Pioda,