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SANS INDICATIF – L’entrepreneur Claude Plouffe de Gatineau, spécialisé dans la fourniture de repas et de collations aux Centres de la petite enfance (CPE), vit l’enfer.
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M. Plouffe, père de quatre enfants, est un contribuable hors de tout reproche. Avant ce litige qui l’oppose à Revenu Québec, son dossier de taxes était vierge. « Je souffre aujourd’hui parce que j’ai obéi à Revenu Québec », commente-t-il.
L’origine du litige remonte à 2002. L’entreprise de M. Plouffe, La Table de Claude, commence à fournir des repas et des collations préparés pour les enfants des CPE. Il contacte alors Revenu Québec pour savoir s’il doit percevoir des taxes sur cette nourriture.
Le préposé de Revenu Québec lui indique qu’il ne doit pas le faire, car les repas sont préparés pour des enfants.
Avant de fournir des repas aux CPE, Claude Plouffe avait eu comme clients des écoles primaires. En vertu de la loi, les repas vendus à ces établissements sont non taxables. M. Plouffe comprend donc que les CPE tombent dans cette catégorie.
Or, en 2007, il change de comptable et sa nouvelle comptable l’avise qu’il n’y a aucune mention relative aux garderies ou CPE dans la Loi sur la taxe de vente du Québec. M. Plouffe se rend donc aux bureaux de Revenu Québec pour voir de quoi il retourne. La personne qui analyse son cas l’avise alors que les CPE tombent dans une zone grise, mais que, d’après elle, il ne devrait pas percevoir la taxe de vente.
Il sollicite un avis écrit sur la question auprès de Suzanne Dagenais, une employée de Revenu Québec, mais celle-ci ne le rappelle pas.
Malgré ce qui précède, Claude Plouffe reçoit en décembre 2007 la visite de deux vérificateurs de Revenu Québec. Puis quelques semaines plus tard, il reçoit un projet d’avis de cotisation pour 2004 à 2007 où on lui réclame toutes les taxes de vente non perçues auprès des CPE, en plus de pénalités et d’intérêts sur ces sommes.
La vérificatrice Danielle Rhéaume explique à M. Plouffe que c’est « plate », mais qu’il va devoir payer en dépit de la mauvaise information qu’il a reçue du ministère. L’avis de cotisation pour les années 2004 à 2007 atteint 107 553 $ et grimpe ensuite à 125 020 $ à cause des pénalités et intérêts. C’est une somme colossale pour sa petite PME.
Ébranlé par ce qu’il considère être une injustice flagrante, M. Plouffe conteste l’avis de cotisation. Mais comme les cotisations concernent des taxes de vente, le processus de perception n’est pas suspendu pendant cette période et il fait l’objet de mesures de récupération agressives.
Puisqu’il est incapable de payer les montants réclamés, Revenu Québec inscrit une hypothèque légale de 45 000 $ sur sa résidence. À l’été 2009, le compte de banque de son entreprise est saisi et vidé, ce qui l’empêche de l’exploiter et cause un grave préjudice à sa réputation.
Revenu Québec retient aussi le remboursement d’impôt auquel il a droit, divers crédits de taxes et une rémunération pour services rendus à des organismes publics.
M. Plouffe dit être passé à deux doigts de sombrer dans une grave dépression. « La seule chose qui m’a sauvé, c’est la paix du cœur. J’ai le cœur pur. Je sais au fond de moi que je n’ai rien à me reprocher », dit-il.
Ce n’est même pas son argent
La situation est encore plus étonnante quand on considère que l’argent qu’on lui réclame n’est pas le sien, mais bien celui des CPE à qui il aurait omis de réclamer la taxe de vente.
Pour régler le litige, M. Plouffe est obligé de poursuivre trois CPE de Gatineau qui refusent de payer les montants non perçus entre 2004 et 2007.
Dans la foulée de ces poursuites et de ces démêlés, sa relation avec sa clientèle s’est évidemment dégradée. Le chiffre d’affaires de son entreprise est passé de 200 000 $ par année à presque rien.
M. Plouffe survit aujourd’hui en travaillant dans une résidence pour personnes âgées. « Ils sont en train de nous mettre à la rue », affirme-t-il. Pour conserver sa maison, il dit avoir dû imposer des sacrifices à toute sa famille. « Il faut couper partout, on se prive de tout ».
Notons par ailleurs que les CPE ont eux-mêmes droit à une ristourne de 50 % sur les taxes qu’ils paient. Revenu Québec réclame donc 125 000 $ à M. Plouffe, mais devra retourner un peu moins de la moitié de cette somme aux garderies qui devraient en théorie le payer.
Souhaitant avant tout de mettre un terme à ce cauchemar, Claude Plouffe a proposé à Revenu Québec de trancher la poire en deux et de régler pour un montant réduit, même s’il estime n’avoir rien à se reprocher.
Revenu Québec refuse cependant tout compromis et s’entête à réclamer la somme totale. La porte-parole de Revenu Québec, Valérie Savard, n’avait pas rappelé Argent vendredi pour commenter cette situation.
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