Pierre Coulombe a été piégé par les journalistes Alain Gravel et Daniel Tremblay de l'émission Enquête.
Photo tirée de son site Internet
Un ancien organisateur en chef
des Conservateurs au Québec qui affirme avoir ses entrées aux plus
hauts niveaux du gouvernement Charest a été filmé par l'émission Enquête en train de monnayer de soi-disant informations privilégiées sur le Plan Nord.
Pierre
Coulombe, qui possède une expérience de plus de 25 ans en politique,
croyait avoir affaire à un représentant d'un groupe d'investisseurs
intéressés par ses «connexions». Il parlait plutôt à un agent
d'infiltration embauché par les journalistes Alain Gravel et Daniel
Tremblay, qui l'a enregistré à son insu.«Les gens que je connais travaillent dans des cabinets de ministres. C'est pas eux qui décident de te vendre une mine. Mais ce qui est important, comme investisseur, c'est d'avoir la meilleure information possible», dit-il à son interlocuteur, lors d'une rencontre dans un hôtel, l'automne dernier.
Il explique être en mesure d'obtenir des renseignements privilégiés sur les concessions minières et d'autres aspects du Plan Nord.
Récompenses
Pierre Coulombe, qui a fait ses classes comme attaché politique au sein du gouvernement Mulroney, explique ensuite comment doivent être récompensés ses contacts au gouvernement. Il insiste : jamais d'enveloppe brune.
«Des gars comme ça, tu les récupères, explique-t-il. Ton entreprise est florissante, tu les récupères sur ton conseil d'administration. Tu les engages, tu dis "On forme un conseil d'administration et on a besoin de tes services. On te donne 25 000 $ par année pour être sur le conseil pendant les 10 prochaines années. On a une réunion par année, ou deux. Parfois, on va peut-être t'envoyer en Europe"».
Il affirme aussi que ses services ne sont pas gratuits. «Ça vaut quoi, ça?» demande-t-il à son interlocuteur.
Rien ne prouve que Pierre Coulombe a vraiment accès à des informations vendables aux entreprises. Mais le reportage démontre ses entrées à des niveaux élevés du gouvernement.
Devant la caméra cachée, il parle d'une fonctionnaire en poste à Schefferville qui freine un projet supposément intéressant pour les investisseurs. Il annonce que la dame va être envoyée à la retraite plus tôt que prévu.
La fonctionnaire a effectivement pris sa retraite peu après. Jointe par les journalistes, elle a toutefois démenti les raisons avancées par Pierre Coulombe.
Avec le bras droit du ministre
Enquête a ensuite filmé Pierre Coulombe lors d'une conférence de Jean Charest sur le Plan Nord. Après le discours, il s'approche du premier ministre et lui donne l'accolade en échangeant quelques mots.
Plus tard, lors d'une nouvelle rencontre avec le collaborateur de Radio-Canada, Pierre Coulombe affirme avoir réussi à mettre la main sur 178 millions de pieds carrés en «claims miniers», des droits d'exploration, où ses sources l'ont informé que le sol recèle des indices de terres rares.
Il identifie son contact : Pierre Gaudreault, le bras droit du ministre délégué aux Mines, Serge Simard.
Pierre Gaudreault a ensuite confirmé à Enquête qu'il a rencontré Pierre Coulombe deux fois cet automne, mais nie avoir parlé de projets miniers. Il n'a pas accordé d'entrevue à la caméra.
Coulombe invite ensuite son interlocuteur à un brunch de financement en présence de Jean Charest. Coulombe chuchote quelque chose à l'oreille du premier ministre.
Dans un communiqué, le bureau de M. Charest affirme que «c'est pour réitérer son souhait d'oeuvrer au sein du gouvernement qu'il s'est adressé à lui lors de l'événement de Laval».
Le premier ministre s'est aussi dit choqué par les propos enregistrés de M. Coulombe, qu'il confirme connaître depuis 1984.
«Après son passage sur la scène politique québécoise, le premier ministre n'a revu M. Coulombe que de façon occasionnelle et dans des événements publics ou des activités du parti. À aucun moment, le premier ministre n'a eu de discussions avec monsieur Coulombe concernant des projets de développement ou d'investissements relatifs au Plan Nord», a déclaré son bureau.
Confronté par les journalistes à la toute fin du reportage, Pierre Coulombe dit avoir menti lorsqu'on l'enregistrait et ne posséder aucune information privilégiée.
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