La journaliste francophone Monique Polloni présente
l’histoire fascinante d’Anne, une femme de 56 ans aux prises avec le
trouble dissociatif de l’identité (TDI) dans son nouveau livre, Je ne suis pas seule dans ma tête.
Le témoignage livré par cette femme marquée par les épreuves — une
survivante — montre que le chemin de la guérison prend parfois des
formes étonnantes.
Ce qui suit décrit les troubles dissociatifs, selon le DSM-IV (1). Celui-ci a été remplacé, en 2013, par le DSM-5. Voyez plutôt : Qu'est-ce qu'un trouble dissociatif ? Quels sont-ils ? (DSM-5).
Les troubles dissociatifs sont caractérisés, selon le DSM-IV (1)
par la survenue d'une perturbation touchant des fonctions normalement
intégrées, comme la conscience, la mémoire, l'identité ou la perception
de l'environnement.
Cinq troubles dissociatifs sont identifiés : l'amnésie
dissociative, la fugue dissociative, le trouble dissociatif de
l'identité, le trouble de dépersonnalisation et trouble dissociatif non
spécifié. Le TDI est moins répandu que les autres troubles dissociatifs, qui surviennent dans approximativement 1 à 3 % des cas, et est souvent comorbide avec d'autres troubles2.
La validité du TDI en tant que diagnostic médical a très souvent été remise en question3,4. Le TDI est plus fréquemment et systématiquement diagnostiqué en Amérique du Nord que dans le reste du monde5,6.
http://www.psychomedia.qc.ca/diagnostics/quels-sont-les-troubles-dissociatifs
https://fr.wikipedia.org/wiki/Trouble_dissociatif_de_l%27identit%C3%A9
Anne habite sur l’île de Vancouver et parle d’elle-même en
utilisant le mot « système ». Car Anne n’est pas seulement Anne : dans
sa tête, plusieurs identités se côtoient. Elles s’appellent Stephie,
Five, Joy, Kylie, Kelsie... Étonnamment, ces identités multiples
l’aident à surmonter des traumatismes importants subis pendant sa
jeunesse.
L’autrice, fortement interpellée par cette femme résiliente et ce
qu’elle vit, s’est penchée davantage sur le sujet. Appuyée par des
experts, elle explique ce qu’est le TDI, et comment ce trouble a un
impact sur toutes les sphères de l’existence.
Monique
Polloni a été bouleversée par cette rencontre et a accepté d’en faire
un livre, après avoir diffusé un photoreportage sur le sujet.
« Je m’intéresse beaucoup aux gens qui vivent des parcours hors du
commun, qui vont nous toucher, qui vont peut-être nous faire avancer,
qui vont nous inspirer. Je cherchais quelqu’un pour un nouveau projet et
des amis m’ont proposé de rencontrer Anne », dit-elle en entrevue.
« Je ne savais pas que j’entrerais dans un monde aussi complexe,
aussi vaste, qui m’aurait autant touchée, autant bouleversée. »
Elle a d’abord passé deux jours avec Anne et son conjoint, Richard.
Une des identités d’Anne, Joy, s’est manifestée trois minutes après
leur arrivée.
« J’avais l’impression d’être dans un film. Et en même temps, j’étais complètement impressionnée. »
Dans la noirceur
Pour faire le livre, Monique Polloni a interviewé Anne deux fois
par semaine, pendant trois mois, sur la plateforme virtuelle Zoom
(pandémie oblige).
« On est allées dans le noir. Joy, qui aime rire, était là. Mais
d’autres identités ont pris le contrôle parce qu’elles voulaient me
raconter ce qui leur était arrivé. Ça a été très dur pour moi, parce que
je recevais toutes ces confidences. Des fois, j’avais de la difficulté à
y croire. »
Elle a ensuite rencontré des spécialistes qui l’ont aidée à comprendre ce qu’est le TDI et ce que vit cette femme.
« Anne est une femme inspirante. Elle a du courage. Elle est
capable d’avoir une vie assez équilibrée et d’avoir beaucoup de joie et
de bonheur dans sa vie. Elle a une bonté et elle rit de bon cœur. Tout
ça, pour moi, c’est très inspirant. »
Capacité du cerveau
La journaliste a été étonnée de la capacité du cerveau à s’adapter.
« Le TDI est une faculté du cerveau qui permet de sauver la vie de
ces personnes-là au moment où elles vivent des traumatismes »,
explique-t-elle.
« C’est comme si tu as un accident de voiture où tu souffres
tellement que tu perds conscience. C’est la même chose. Finalement, il y
a des identités qui sont créées. Anne donne à une autre partie du
cerveau le travail de vivre ça. Et ça va se cacher très très loin dans
la mémoire traumatique. »
Trouble méconnu
Elle souligne que le TDI est très peu connu, mal diagnostiqué et sous-diagnostiqué.
« Il y a beaucoup de diagnostics erronés avant d’arriver à avoir le
vrai diagnostic. C’est ça qui est très triste. Et souvent, le
traitement n’est pas approprié. Anne, par exemple, a été hospitalisée en
psychiatrie. Elle s’est bourrée de médicaments. Elle n’en prend plus
aucun, aujourd’hui. »
« Les personnes qui ont un TDI ne veulent pas que ça se sache.
Elles ont très peur. Elles ont peur d’être démasquées. Elles ont honte.
Si elles parlent, elles ne trouvent pas toujours les mots pour dire ce
qui s’est passé. »
♦ Je ne suis pas seule dans ma tête - Survivre grâce aux identités multiples, Monique Polloni, préface du Dr John A. O’Neil, 208 pages.
♦ Monique Polloni a créé, réalisé et animé de multiples projets radiophoniques ainsi que des émissions régionales et nationales.
♦ Elle habite en Colombie-Britannique.
EXTRAIT
« Le trouble dissociatif de l’identité qu’Anne
a développé n’a jamais été diagnostiqué par les médecins et thérapeutes
qu’elle a consultés à l’époque. Elle a reçu de nombreux diagnostics
erronés de troubles mentaux au préalable, ce qui est courant chez les
patients atteints du TDI. Selon les experts, les patients reçoivent cinq
ou six mauvais diagnostics avant que leur TDI soit identifié (et il est
possible aussi qu’il ne soit jamais diagnostiqué). Certaines personnes
ne sauront jamais qu’elles en sont atteintes tellement ce trouble est
peu connu des praticiens ; par conséquent, elles ne bénéficient pas des
soins appropriés. »
- Le trouble dissociatif de l'identité
Le trouble dissociatif de l'identité (auparavant appelé personnalité multiple)
est caractérisé par la présence de deux ou plusieurs identités ou
« états de personnalité » distincts qui prennent tour à tour le contrôle
du comportement du sujet, s'accompagnant d'une incapacité à évoquer des
souvenirs personnels. Cette incapacité est trop importante pour
s'expliquer par une mauvaise mémoire.
Voici les critères diagnostiques de ce trouble :
A. Présence de deux ou plusieurs identités ou « états de
personnalité » distincts (chacun ayant ses modalités constantes et
particulières de perception, de pensée et de relation concernant
l'environnement et soi-même).
B. Au moins deux de ces identités ou « états de personnalité » prennent tour à tour le contrôle du comportement du sujet.
C. Incapacité à évoquer des souvenirs personnels importants, trop marquée pour s'expliquer par une simple mauvaise mémoire.
D. La perturbation n'est pas due aux effets d'une substance ou d'une affection médicale générale.
N.B. Chez l'enfant, les symptômes ne peuvent pas être
attribués à des jeux d'imagination ou à l'évocation de camarades
imaginaires.
Quel est le traitement du trouble dissociatif de l'identité ?
Actuellement, il n'existe pas de directives scientifiquement prouvées pour le traitement des TDI. Cependant, certains des traitements les plus efficaces sont les suivants :
- Psychothérapie : Cette thérapie peut aider à
analyser ce qui a déclenché le trouble de l'identité. En fait,
l'objectif de ces thérapies est de "fusionner" les traits de
personnalité qui sont séparés de la personnalité principale et d'essayer
de contrôler les déclencheurs.
- Hypnothérapie : Utilisée conjointement avec la psychothérapie, l'hypnose clinique
peut être utilisée pour aider les patients à accéder à des souvenirs
refoulés, ainsi qu'à gérer certains des comportements problématiques qui
peuvent accompagner le TDI.
- Thérapies artistiques : il a été démontré que l'art
ou la danse peuvent aider les gens à se connecter à des parties de leur
esprit qui ont été bloquées en raison d'un traumatisme.
Il convient de noter qu'il n'existe pas encore de traitement pharmacologique pour aider le trouble dissociatif de l'identité.
Cependant, comme ce trouble s'accompagne souvent d'autres problèmes de
santé mentale, comme l'anxiété ou la dépression, des médicaments peuvent
parfois être utilisés pour traiter ces problèmes.
Les personnes atteintes de ce que l'on appelle communément le "syndrome de la personnalité multiple"
sont souvent stigmatisées en raison des mythes qui sous-tendent ce
trouble. Par conséquent, le soutien des proches est vital pour que les
personnes atteintes du syndrome de la personnalité multiple se sentent
soutenues pour faire face à ce trouble.
https://www.psychologue.net/articles/trouble-dissociatif-de-lidentite-7-symptomes-qui-indiquent-que-vous-avez-plusieurs-personnalites
REF.: https://www.journaldemontreal.com/2023/05/28/je-ne-suis-pas-seule-dans-ma-tete-survivre-grace-aux-identites-multiples