On entend dire régulièrement qu’il suffit de taxer les riches pour
financer les projets de l’État. Pauline Marois, par exemple, tentait
récemment de nous convaincre qu’une hausse du taux d’imposition des plus
fortunés contribuerait au financement de la santé.
Le problème avec cette idée de génie, c’est qu’elle ne fonctionne pas. L’expérience récente du Royaume-Uni, laquelle s’ajoute à une longue liste d’expériences similaires, le confirme.
L’an dernier, le Trésor britannique a relevé de 40 à 50 % le taux d’imposition des contribuables touchant un revenu annuel de 150 000 £ ou plus (environ 235 000 $ CA). À la suite de cette initiative, qui devait rapporter 2,5 milliards £ à l’État, on a plutôt observé une chute des recettes fiscales de 500 millions £.
Ces chiffres ont semé la consternation. Pourtant, voilà près de cinq siècles que les économistes ont compris qu’il existe une relation inverse entre les taux d’imposition élevés et les entrées fiscales.
Au XVIe siècle, l’économiste français et conseiller de Henri IV, Barthélémy de Laffemas, avait déjà constaté que plus on taxe les riches, moins ils paient d’impôts. C’est d’ailleurs lui qui serait l’auteur de la formule « les hauts taux tuent les totaux ». Puis, en 1844, ce fut au tour de Jules Dupuit, ingénieur et économiste français, d’observer le même phénomène. Plus récemment, pendant les années Reagan, l’économiste américain Arthur Laffer s’est fait connaître pour sa formule « trop d’impôt tue l’impôt ».
Quand la classe politique préconise une hausse du fardeau fiscal, elle part de l’hypothèse que pareille mesure sera sans effet sur le comportement des contribuables. Or, si on peut soumettre les gens à un taux d’imposition plus élevé, on ne peut les forcer ni à travailler ni à investir. On ne peut non plus empêcher les riches de placer leur argent ailleurs dans le monde. En pratique, trop d’impôt tue le travail et fait fuir les riches.
À cet égard, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), en vigueur en France, est instructif. Depuis les années 1990, plusieurs dizaines de milliers de fortunes françaises ont été expatriées, privant ainsi le Trésor public de 12 à 15 milliards d'euros de recettes par an. En revanche, quand les taux ont été allégés et que 300 000 contribuables ont été exonérés, les recettes de l’ISF ont moins diminué que prévu. Simple coïncidence?
Nos dirigeants tirent-ils des leçons des enseignements de l’Histoire? Évitent-ils de reproduire les erreurs du passé? Pas du tout! Ils continuent de nous servir de vieux clichés sans fondements économiques et de nier une réalité connue depuis fort longtemps. Pourquoi? Tout simplement parce que faire la chasse aux riches est politiquement très vendeur.
Comprenons-nous bien. S’il faut maintenir le taux d’imposition maximal à un niveau raisonnable, ce n’est pas pour accorder un privilège aux riches. C’est pour encourager le travail et maximiser les entrées fiscales, et ainsi épargner la classe moyenne. Pensez-y bien, si les riches se sauvent pour éviter un impôt confiscatoire, dans les poches de qui l’État pigera-t-il sinon dans celles de la classe moyenne?
REF.: Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Le problème avec cette idée de génie, c’est qu’elle ne fonctionne pas. L’expérience récente du Royaume-Uni, laquelle s’ajoute à une longue liste d’expériences similaires, le confirme.
L’an dernier, le Trésor britannique a relevé de 40 à 50 % le taux d’imposition des contribuables touchant un revenu annuel de 150 000 £ ou plus (environ 235 000 $ CA). À la suite de cette initiative, qui devait rapporter 2,5 milliards £ à l’État, on a plutôt observé une chute des recettes fiscales de 500 millions £.
Ces chiffres ont semé la consternation. Pourtant, voilà près de cinq siècles que les économistes ont compris qu’il existe une relation inverse entre les taux d’imposition élevés et les entrées fiscales.
Au XVIe siècle, l’économiste français et conseiller de Henri IV, Barthélémy de Laffemas, avait déjà constaté que plus on taxe les riches, moins ils paient d’impôts. C’est d’ailleurs lui qui serait l’auteur de la formule « les hauts taux tuent les totaux ». Puis, en 1844, ce fut au tour de Jules Dupuit, ingénieur et économiste français, d’observer le même phénomène. Plus récemment, pendant les années Reagan, l’économiste américain Arthur Laffer s’est fait connaître pour sa formule « trop d’impôt tue l’impôt ».
Quand la classe politique préconise une hausse du fardeau fiscal, elle part de l’hypothèse que pareille mesure sera sans effet sur le comportement des contribuables. Or, si on peut soumettre les gens à un taux d’imposition plus élevé, on ne peut les forcer ni à travailler ni à investir. On ne peut non plus empêcher les riches de placer leur argent ailleurs dans le monde. En pratique, trop d’impôt tue le travail et fait fuir les riches.
À cet égard, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), en vigueur en France, est instructif. Depuis les années 1990, plusieurs dizaines de milliers de fortunes françaises ont été expatriées, privant ainsi le Trésor public de 12 à 15 milliards d'euros de recettes par an. En revanche, quand les taux ont été allégés et que 300 000 contribuables ont été exonérés, les recettes de l’ISF ont moins diminué que prévu. Simple coïncidence?
Nos dirigeants tirent-ils des leçons des enseignements de l’Histoire? Évitent-ils de reproduire les erreurs du passé? Pas du tout! Ils continuent de nous servir de vieux clichés sans fondements économiques et de nier une réalité connue depuis fort longtemps. Pourquoi? Tout simplement parce que faire la chasse aux riches est politiquement très vendeur.
Comprenons-nous bien. S’il faut maintenir le taux d’imposition maximal à un niveau raisonnable, ce n’est pas pour accorder un privilège aux riches. C’est pour encourager le travail et maximiser les entrées fiscales, et ainsi épargner la classe moyenne. Pensez-y bien, si les riches se sauvent pour éviter un impôt confiscatoire, dans les poches de qui l’État pigera-t-il sinon dans celles de la classe moyenne?
REF.: Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.